Les yeux d'autrui
Un autre. Il s'appelle Jérôme aussi, et habite à deux pas de chez Maxime... Hasard et coïncidence qui évoquent un mauvais scénario de film (cf. Claude Lelouch). L'intrigue se passe dans un appartement du XVIème arrondissement de Paris, avec moulures au plafond et crucifix au dessus du lit. Un homme blanc de 34 ans me déshabille lentement, m'embrasse, me caresse partout. Il me complimente sur la douceur de ma peau, sur la plastique de mon derrière et de mon érection. Le temps d'un après-midi pluvieux, un autre me donne du plaisir.
Ne vivant plus que d'eau fraîche, mon corps a beaucoup maigri ces temps-ci. L'odeur des cigarettes blondes que je fume par paquet, et le renfermé du placard, imprègne mes vêtements. J'ai si honte de moi que je n'ose regarder personne dans les transports en commun. Je ne suis pas toujours capable de lire dans les yeux d'autrui autre chose que le dégoût de ma propre laideur.
Pauline en pleurs me téléphone en direct de Marrakech. Mais comment sécher ses larmes à distance ?
Maxime copule toujours les paupières closes avec moi. Il n'est pas si irrésistible que je ne puisse me passer de lui.
J'ai cessé d'aller voir un psy pour des raisons obscures. En mettant fin à ces séances du mercredi, jour des enfants, je voulais prouver mon autonomie d'adulte. Depuis lors c'est tout seul que je m'écoute vieillir allongé. Pas tout à fait pourtant, puisqu'il y a ceux qui me lisent, que je connais ou qui sont étrangers. Pour vos esgourdes rien que, et les miennes, donc.
"Accueillir Autrui, c'est mettre ma liberté en question." (Emmanuel Lévinas, Totalité et infini.)