Jour de noce
Pendant que la Gay pride parade à Paris, je fais la noce à la campagne : France et Siegfried se marient, j'ai l'honneur d'être leur témoin.
On me traite souvent de midinette. Soit. Comme on voudra... Sauf que, l'amour, je n'y crois. Je n'ai pas d'expérience en la matière. J'ai lu des livres là dessus, et vu des films, l'amitié de quelques uns me réchauffe, des hommes m'ont désiré. Voilà ce dont je peux témoigner.
Hélas, ce blog est la preuve flagrante que l'amour fait défaut dans ma vie.
Et cependant, lorsque je suis avec France et Siegfried, quoi que je sache par ailleurs, je ne saurais nier l'existence de l'amour. Dès que je baigne en leur présence, que je pense à leur union, jaillit, invincible, la certitude extraordinaire que l'amour existe ici-bas. Bel et bien. C'est à eux deux que je dois cette grâce.
Ça commençait mal pourtant. Un garçon attendait à sa fenêtre. (D'habitude dans les histoires, une jeune fille se languit au sommet de la tour, mais là c'était un garçon...) France passait dans la rue. Ils se regardaient, ils se souriaient. Tous les jours, plusieurs fois par jour. Jusqu'au jour où, tandis qu'elle nettoyait son linge à la laverie du bas de l'immeuble, France sentit une main sur son épaule : c'était le garçon descendu de sa fenêtre... Il s'appelait Siegfried, comme le héros de Wagner dont la grand-mère de France lui contait la chanson de geste quand elle était enfant. Il s'appelle toujours Siegfried.
Ça commençait mal, disais-je. De quoi allaient-ils parler une fois le plaisir consommé, la jouissance épandue ? S'il suffisait de se plaire pour s'aimer !
C'était il y a 9 ans. Ce ne fut pas toujours facile. Il leur fallut apprendre.
Aujourd'hui, 15h30, à la mairie, France porte un tutu blanc, Siegfried une cravate à pois, moi un badge Love avec un coeur. Oui.
Vivent les mariés !
"Aimer n'est rien d'abord qui signifie se fondre, se donner et s'unir à un seconde personne (que serait en effet l'union de l'inéclairci, de l'imprécis, de ce qui n'est pas encore en ordre) c'est pour l'individu une sublime occasion de mûrir, de devenir en soi-même quelque chose, de devenir monde, pour l'amour d'un autre, monde pour soi-même." (Rainer Maria Rilke, Lettres à un jeune poète.)