Ma cage
Je garde le chat de Pollyanna pendant ses vacances. C'est un chat de gouttière, tigré, ramassé à un carrefour, une brave bête. La nuit il se colle à mes flancs pour dormir, comme moi il n'aime pas la solitude du sommeil. J'ai honte. Il renifle ma vie, je me sens très vieux. Il demande toujours des caresses, ou bien ne cesse de miauler devant les fénêtres. Il voudrait sortir de sa prison domestique. Je n'ai pas le cran de supporter ça, donner ce qu'il réclame. Il ne comprend pas bien sûr, c'est un chat. Son pelage me suit jusque dans la rue, sur mon manteau quand je sors j'époussette les poils.
Dehors, dedans, je tourne en rond. Mes amours unilatéraux, aimer à sens unique : je vire comme un lion en cage. Je n'ai pas encore 30 ans, mais je ne veux pas finir comme j'ai commencé, seul. Avec un chat. J'ai abandonné le mien à ma mère lorsque j'ai quitté la maison de mon enfance il y a 8 ans. D'ailleurs elle me disait à Noël que si je l'avais prise avec moi, car c'est une femelle noire, ma chatte serait morte depuis longtemps. J'ai cru à une méchanceté maternelle, cependant maman avait peut-être raison...
Il y a trop de solitude dans ma vie. C'était une force, à présent ce n'est qu'une mauvaise habitude, un vice, une punition. Je ne veux pas pourtant de compagnie, d'un faux semblant de couple et conjurer l'isolement à deux, pas de ces façons communes. L'amour doit rester incommensurable tous les jours.
Que vais-je faire maintenant ?
"Quelqu'un qui dit qu'il est seul ne ment jamais" (réplique de Clift Montgomery dans le film Tant qu'il y aura des hommes.)