Rien à signaler
L'écriture même se tarit depuis quelques temps.
L'avenir est une abstraction pesante. Pourrissement de la situation. Je suis incapable d'anticiper, prévoir, au delà d'une semaine. Demain : je serai mort, ou bien on avisera le moment venu. La journée comme unité de mesure. Mon quotidien ces jours-ci rime avec Rien, R majuscule. Je fume plus que de raison. Je prépare mon cancer des poumons. J'étouffe.
Des amants irréguliers apaisent les tensions de ma tuyauterie, la durée d'un orgasme.
Je suis la louve solitaire, je suis le lion à la crinière, raconte ma chimère.
L'un me culbute sur sa couette à motifs aztèques, l'autre après l'amour parle de son travail. Un autre encore s'essuie la queue avec un rouleau de Sopalin qu'il me tend ensuite comme une planche de salut. Celui-ci dit "le kiki" à la place de "la bite" ou de n'importe quel synonyme de ce mot. Etc.
La pauvreté de leur monde me désole. Et pourtant je n'échappe pas au lot puisque je bandais pour eux.
"La vie est un tas de mégots" affirmait il y a peu mon amie Pollyanna. Je cherche un corps incandescent dans cet amas de cendre.
Comment s'appelaient-ils déjà ?
Je ne cherche pas à constituer un tableau de chasse, je mène une enquête, à la manière d'un sociologue je classe, j'expérimente, j'apprends, je glane des informations... Objet d'étude : l'incarnation, la mienne et celle de mes partenaires d'occasions, les variables testées permettant d'affiner les critères de compatibilité entre les corps XY.
Je cherche une exeption qui infirme la règle. Bijou, caillou, chou, genou, pou, hibou, joujou.
Vendredi, je pars en vacances chez ma mère en province.
C'est tout. Rien à signaler.
"Les cendriers indifférents / délimitent mes déplacements" (Michel Houellebecq, Séjour Club 2.)