Summertime
Le temps de l'été est celui de l'insouciance.
J'ai vécu intensément pendant ce temps. Il faudrait parler de nos echanges de mails avec Adrien, de l'exposition des Réfugiés, de ma performance à cette occasion, du grand concert de Pollyanna, des soirées arlésiennes, de la rencontre avec Mathieu, des fiançailles imprévues de mon père, de mon anniversaire du 13 juillet, des feux d'artifices et du bal des pompiers dans la campagne de l'Ardèche, des baignades au fil de l'eau, des amis qui me gâtent, de ma lettre à Benoît.
Mais sitôt revenu à Paris, les soucis m'assaillent. Je dois combler un découvert exorbitant accumulé depuis des mois, ma dette avoisinant les 2000 euros et des poussières. Ces tracas sordides de trésorerie me plongent dans un abattement tel que je songe au suicide pour y échapper. Absurdité du réel : je ne suis qu'un tube digestif à nourrir, qui n'a pas les moyens de ses besoins. J'ai crié victoire un peu vite.
Cependant Thierry attendait mon retour de villégiature. Je revois son visage timide transfiguré par le coït. C'est ainsi qu'il me plaît. Il s'avère désormais un partenaire versatile, convaincu par mes soins. J'ai la place d'amant clandestin dans sa vie de père de famille. Moi je voudrais fonder une communauté plutôt qu'un foyer, j'ai encore beaucoup d'amour à donner. On a beau se réputer solitaire, on a tout de même besoin d'être entouré...
Le temps se brouille. Nous sommes quelques jours avant la fin du mois. Sur les quais de la Seine, on prépare une plage. Comment survivre au coût de la vie, à sa propre famille, à l'affection de ses proches, à l'indifférence des autres, aux langueurs estivales ?
"Rompre les mille noeuds dont la ville nous lie ; / Si nous pouvions quitter ce Paris triste et fou." (Victor Hugo, Les Contemplations.)